L’urbanisme du centre historique de Beaucaire fut celui d’une cité militaire. Rectiligne, la disposition des rues évoque celle de sa voisine médiévale, Aigues-Mortes. Rare ville provençale à ne pas posséder de remparts d’enceinte, Beaucaire s’organise autour de la rue principale et du quai du canal du Rhône à Sète, utilisé comme port d’attache par de nombreux bateaux, qui participent ainsi au caractère des lieux. Ces deux grands axes est-ouest, qui se déploient au pied du château, sont traversés d’une multitude de rues, selon un tracé nord-sud, qui rejoignent le quai déjà nommé.
La maison, édifiée à la fin du 16e s., est aujourd’hui élevée de deux étages sur rez-de-jardin. Elle se situe dans l'une des rues transversales, à l’abri du mistral et des intempéries.
Aucune façade n’est apparente à partir de de la rue et aucune fenêtre ne s’y ouvre. Seule est visible une large porte charretière à encadrement en bossage de pierres des carrières de Fontvieille, surmontée d’un sobre entablement. L'un des angles tronqués de l’encadrement témoigne de son usage utilitaire, destiné au passage de charges hautes et lourdes. Les deux vantaux en lames verticales de bois peintes en gris et cloués à hauteur d’homme ne comportent aucun ornement, ce qui accentue encore la destination utilitaire du lieu.
La porte ouvre directement sur une cour, transformée aujourd’hui en un rafraichissant jardin qui isole la maison de la rue, au demeurant peu passante. Au Moyen Âge, le lieu fut sans doute l’entrepôt d’un riche marchand de la célèbre foire locale ou du seigneur qui possédait la maison voisine, Jean-Joseph Escudier de Beaulieu, conseiller du roi, président-juge des fermes et lieutenant des ports au siège de Beaucaire. L’affectation à usage d’habitation de l’entrepôt, qui en devient alors le rez-de-cour, date de la fin du 19e s. Quelques aménagements antérieurs perceptibles à l’étage peuvent laisser penser que le niveau situé au-dessus de l’entrepôt médiéval était occupé par la domesticité dudit seigneur.

La maison

S’ouvrant sur sa cour végétalisée par une large baie en plein cintre rehaussée par une menuiserie à armature métallique noire résolument contemporaine, elle n’a plus rien de l’entrepôt qu’elle fut autrefois et tout d’une élégante résidence urbaine.
Chaque pierre porte ici témoignage et mémoire. La façade en pierres des carrières de Fontvieille, soigneusement restaurée, a conservé quelques détails uniques d’architecture. Ainsi, une ancienne porte murée au premier étage, vestige d’un aménagement passé, et les traces d’une fenêtre à meneau, aujourd'hui disparue, racontent l’évolution du bâti. Ces éléments disparates lui apportent un caractère mystérieux. L’escalier extérieur en pierre, assez rustique, permet de rallier directement la cour au premier étage, offrant un accès indépendant aux espaces de vie principaux.

Le rez-de-chaussée
À partir de la cour, s’ouvre sur une cuisine aménagée, parfaitement intégrée dans son environnement historique. La grande baie cintrée vitrée illumine tout l’intérieur et offre une vue directe sur la cour, établissant un dialogue fluide entre intérieur et extérieur. Au centre de la pièce, adossée au mur sud, trône une cheminée en pierre en parfait état de fonctionnement, tandis que, au fond, adossé au mur ouest, un escalier en béton ciré, sans rampe, au design épuré, conduit au salon, situé à l’étage. Non loin de l’escalier, une grande trappe discrètement intégrée au sol dissimule une cave voûtée d’époque médiévale, accessible par une échelle en métal, dont la surface équivaut à celle de la cuisine, avec des murs en appareil irrégulier de pierres et un sol en terre battue.

Le premier étage
Le haut de l’escalier est marqué par un vestige de baie comportant un ornement du 16e s. Le salon traversant, aux murs peints d'un vert céladon, se distingue des autres pièces de l'habitation par une imposante cheminée en pierre et des plafonds à la française, dont les poutres en bois blanc témoignent du savoir-faire traditionnel local, tandis que le sol en béton ciré apporte une note contemporaine à l'espace. Il est relié à l’escalier extérieur qui mène à la cour et à un escalier intérieur en pierre, qui dessert l’unique chambre de la maison, établie sous les toits. Dans un angle discret de la pièce, une salle d’eau bénéficie d'un aménagement pratique qui ne dénature nullement l’harmonie de l’espace.

Le second étage
L’entrée de la chambre se fait par une basse porte de 1,3 m de hauteur. L'espace est baigné de lumière grâce à deux fenêtres de la même hauteur que la porte, ajoutant au caractère de la pièce et encadrant joliment la vue sur l’extérieur. Une fois la porte franchie, la chambre aux murs peints d'un doux gris-bleu s’élève pour atteindre une belle hauteur sous plafond. Derrière le lit, un aménagement astucieux abrite une salle d’eau, des toilettes et un espace de rangement, parfaitement intégrés et préservant ainsi l’élégance et la fonctionnalité de la pièce.